Nous vieillisons ensemble …et alors ?

Prologue

C’est une douce soirée du mois de mai. Aussi loin que porte le regard tout au long de la baie, sur le tracé menant vers la Pointe Rouge, on peut apercevoir les lampadaires qui s’allument et scintillent au fur et à mesure que la nuit se fait de plus en plus sombre.

Marseille, comme tous les soirs se pare et s’embrase des illuminations nocturnes. Martha s’attarde un instant sur le balcon, savourant cet instant où la lumière du jour fait place aux reflets des couleurs de la fée-lumière, sur la mer.

Cet après-midi, ils se sont longuement promené le long de la plage, main dans la main, flânant avec bonheur. Dès les premiers beaux jours, les plus hardis des baigneurs profitent de la mer et de la vaste étendue de sable bordée par des pelouses sur une partie de la Corniche, avant que l’assaut des lieux ne soit donné plus tard dans la saison, le plus souvent par les habitués familles avec enfants, et sans compter les jeunes gens arrivant en bandes joyeuses. L’endroit est idéal pour les jeux de ballon et la détente, avant que la plage n’atteigne pas en période estivale sa saturation d’occupation.

Il n’est plus de leur âge ces longs moments de bronzage allongés sur le sable, pas plus que les jeux, néanmoins le lieu se prête encore aux longues flâneries dans une quiétude relative, particulièrement en ce mois de mai, au climat plus que clément.

Comme d’habitude après-diner, ils ont desservi la table ensemble dans un exercice bien rodé, avant de s’installer dans le salon, pour prolonger ce moment qui précède leur coucher. Paul a retrouvé son fauteuil préféré et ne semble pas disposé à partager une quelconque discussion, découvrant avec plaisir semble-t-il, le livre qu’il a acheté ce matin même.

Martha ne sait pas ce qui l’agace ce soir, rien ne pouvait présager cet énervement qu’elle sent monter en elle. Aussi, s’est-elle attardée dans la contemplation nocturne de la ville un long moment, retardant l’instant de retrouver son mari. Elle éprouve le besoin de croiser le fer malgré l’heure tardive, et c’est dès son retour dans la pièce qu’elle lance malgré elle la première pique :

– Paul s’il te plait, quitte ce livre un instant et réponds-moi ! Nous vieillissons ensemble, et alors ?

–  Alors, quoi ?

– Est-ce ce à quoi nous rêvions lorsque nous avions vingt ans, à l’image d’Épinal à laquelle nous pensions ?

– Heu, mais je n’en sais rien moi ! Tu m’agaces, c’est quoi cette question ?

– Tu ne sais jamais rien toi !

– Pourquoi parles-tu d’image, on s’aimait et puis c’est tout…

– Et maintenant on ne s’aime plus !

– Qu’est ce qui te prend ce soir. Ce n’est pas ce que j’ai dit, maintenant c’est juste différent …

Paul essaye de fuir la conversation en se plongeant dans son livre. Martha s’impatiente et tourne dans la pièce, déplaçant un bibelot, remettant en place une revue, la chaise qu’il laisse toujours au milieu du passage. Elle est bien consciente que la conversation est mal engagée, qu’une fois encore s’il n’arrive pas à la faire culpabiliser il va répondre forcément un mot ou une phrase qui va la blesser. Une petite voix intérieure lui susurre :

 Arrête Martha, tu sais bien que Paul est ainsi fait et qu’il ne sortira rien de bon de vos échangeset puis il n’a pas tort, c’est quoi ce soir cette question ?

Martha sait bien, mais elle espère toujours une réponse qui va la faire sortir d’un mal être qu’elle ne sait comment justifier, encore moins après une journée qui a été agréable. C’est plus fort qu’elle, il faut qu’elle continue à discutailler.

La voix de la raison qui l’habite souvent, est de sortie ce soir, elle a dû lui donner congé sans s’en apercevoir !

– Paul admet que se réjouir de voir des couples qui vivent ensemble plus de cinquante ou même soixante ans… et parfois même plus, c’est idiot !

– Allons bon, qui a fêté son anniversaire et que j’ai oublié ?

– Personne voyons, c’est juste une question…

– Enfin ça te prend comme ça, il y a bien eu quelque chose pour que tu poses cette question !

– Puisque je te dis …peut être …je ne sais pas moi…oui peut être cette photo sur le journal avec cette famille à la mine réjouit…qui entourait leurs parents…

Paul adore ergoter, provoquant, titillant, cherchant le point où ça fait mal, jusqu’à ce que Martha perde son calme, et tant pis s’il est de mauvaise foi !  Ça met de l’animation dans une maison devenue trop silencieuse, dit-il parfois avec un petit sourire qui ne fait qu’énerver un peu plus Martha.  Seulement pas ce soir, car il a surtout envie de découvrir le livre qu’il a enfin déniché.

  • Je savais bien que quelque chose t’avait choqué, on se demandait quoi d’ailleurs ! Je ne te comprends pas, tu préfères ceux qui divorcent au bout de quelques mois ?

– Non, bien entendu que non, cependant se voir vieillir ce n’est déjà pas facile, alors ensemble s’il n’y a plus d’amour…

–  Il reste l’amour voyons…c’est quoi ces sornettes !

– Ah tiens tu me fais rire ! Tu appelles ça de l’amour ? L’amour c’est …l’amour…ce sont les corps qui s’enflamment…c’est…

– Et alors, il n’y a pas d’âge pour ça…

– Ah bon ! Quand j’y pense ! Les mecs pour vous le béat de l’amour c’est quand vous avez votre – petite gâterie – beurk, tiens ça m’écœure !

Paul éberlué, regarde sa femme et ne la reconnait pas, ce n’est pas dans ses habitudes de parler ainsi. Va-t-il entrer lui aussi dans ce genre de discussion dans laquelle il ne se sent pas le meilleur rôle…excédé il se lève,

– Bonne nuit ma chérie, je vais aller me coucher !

– C’est ça, lorsque les vérités te dérangent fuit, c’est tout ce que tu sais faire ! Nous en reparlerons, ne crois pas la conversation terminée !

Il hausse les épaules et sans un autre regard vers Martha, il se dirige vers la chambre qu’il partage depuis quelques mois, seul avec lui-même. Qu’est ce qui justifie que Martha ait eu envie de déclencher cette discussion juste ce soir-là, alors que tout est calme dans la maison et qu’elle juge avec le recul du temps, plus que stupide ?

–  Le facteur déclencheur à ce drôle de sentiment de mal être que je ressentais ce soir, a été provoqué par une scène où l’homme réclamait une « gâterie » à sa compagne que j’ai vu en zappant sur les programmes de la télévision ! Non, non, ce n’était en aucune façon un texte pornographique, ce n’est pas là où je trouve mes émotions C’est justement pour cela que j’ai trouvé la scène choquante, et que j’ai réagi avec une colère intérieure…oui c’est bien ça, cette mise en avant du plaisir de l’homme demandé ainsi m’a mise en colère.

Serais- avec les années, devenue prude ? Certainement pas, j’apprécie aujourd’hui encore la sexualité dans le couple, bien qu’elle soit différente de nos premiers émois. L’acte en soi pour un couple amoureux je dirai qu’il est normal si je puis dire mais une demande à froid, beurk ! En fait c’est ça ! C’est ce côté hors de tout sentiment, qui m’a révolté ! Plus la photo sur le journal, de cette famille un peu gnangnan et je n’ai plus contrôlé mon humeur ! C’était stupide certes de m’énerver ainsi !

Dans les jours qui suivirent Paul n’eut pas envie de revenir sur cette discussion qui l’avait en partie perturbé. Martha se sentant un peu honteuse de sa réaction, peu à l’aise pour poursuivre sur le fond, fit de même et le sujet fut clos entre eux du moins ce soir-là, de façon un peu abrupte. Est-ce pour autant qu’aucun des deux n’y pensa par la suite ? Sans doute pas, si aucun des deux n’oublia vraiment pas cet étrange échange, la question en cause ne reçue pas de réponse franche et directe, du moins dans l’immédiat.

Lorsqu’Églantine raconte… Le papillon, Vincent l’Écrivain, et les autres

Prologue

Cette année-là, le printemps a pris un peu d’avance sur le calendrier. Chaque après-midi un papillon, toujours le même, – d’une incroyable et peu commune couleur bleue irisée -, vient rendre visite à Vincent l’Écrivain.

Ce papillon bien particulier a certainement vu le jour dans une forêt tropicale, et très probablement au Costa Rica. Néanmoins, nul ne sait comment il s’est retrouvé un jour dans le sud de la France. Avec aplomb, il a toujours prétendu souffrir d’une amnésie partielle pour ne jamais dévoiler comment s’est fait ce long voyage qui le mena jusqu’en Provence. Toujours est-il qu’il adopta Vincent, et que Vincent l’adopta !

Le bureau où officie depuis quelques années ce dernier, se situe dans l’aile Est du mas, à l’opposé de l’espace de vie. Orienté, est-ouest, le soleil vient s’y glisser dès son lever, c’est-à-dire dès que la lune veut bien lui laisser la place dans les nues. Il entre par les fenêtres laissées grandes ouvertes aux premiers beaux jours, l’hiver, il toque simplement aux carreaux. Dès midi passé, c’est à travers deux larges baies qui entourent un pan de mur avec une petite fenêtre – là où se pose sur le rebord en observation le papillon – que le soleil essaye de s’infiltrer jusque dans la pièce, afin de distraire l’Écrivain de son ouvrage. Cependant, la plupart du temps, ses tentatives restent vaines.

C’est au milieu d’une vaste propriété dans la campagne provençale, qu’ont été construits les différents corps de cette bastide, – L’Éouvé[1] –, afin que chaque génération puisse y vivre sans empiéter sur la vie des autres membres. Si on y vit en famille comme autrefois, en harmonie avec la nature et les animaux, la production céréalière a été confiée récemment à un métayer.

Des aménagements modernisant les lieux anciens de l’habitation y ont été apportés, y compris un nouveau confort qui était plus que succinct dans les temps d’autrefois.

À l’opposé du bureau, habite un couple charmant de nonagénaire, Estève et Laure, les grands-parents de Vincent, menant une vie paisible, heureux d’avoir leur petit monde autour d’eux pour cette dernière tranche de leur vie. C’est par leur travail, que le domaine s’est développé, que les cultures se sont diversifiées au fil des années, transmettant ainsi à Olivier et à sa femme, un patrimoine en pleine expansion.

Vient ensuite la partie réservée aux parents, Olivier et Anne, qui ont pris une semi-retraite à leur tour, après avoir transmis la gestion de l’exploitation à la sœur de Vincent et son mari, Charlotte et Hugues. C’est dans l’aile sud qu’ils sont logés avec leurs trois enfants, Jean l’aîné qui quittera bientôt le nid pour la suite de ses études, Aurélien et la petite dernière Estelle encore scolarisée à l’école communale du village.

En suivant en ligne droite la construction, se trouve l’espace de vie de Vincent, d’Ambre sa femme, et de leurs deux adolescentes, Alice et Sophie. Ces dernières partent tous les matins avec le car scolaire rejoindre le lycée de la ville voisine. Là, où Ambre enseigne la littérature à des têtes pas spécialement blondes et pas toujours très disciplinées !

Après bien des mois, ce jour-là, Vincent, met un point final au dernier chapitre de son roman. Le printemps pointe le bout de son nez, et son regard s’égare vers le champ voisin où paissent en silence des brebis et des moutons. Une vague blanche sur une mer verte !

— Voilà encore un livre qui est sur le point d’être achevé. Bientôt, il me quittera pour aller dans les mains de mon éditeur qui n’aura de cesse que de me faire corriger ceci ou cela, médite l’Écrivain nostalgique. Lorsque celui-ci répondra à ses attentes, il fera pression sur moi pour m’inciter à me consacrer à l’écriture d’un prochain manuscrit, c’est certain ! Je n’ai plus l’enthousiasme qui m’habitait il a peu de temps encore. D’ailleurs, l’éditeur aura raison de me demander de corriger certaines parties du texte, je ne suis absolument pas satisfait moi-même de ce livre !

Les parfums du lilas, du jasmin, ainsi que des arbres fruitiers en fleurs – parfums rendus encore plus intenses avec les rayons du soleil couchant – arrivent jusqu’à lui et lui chatouillent les narines l’invitant à une promenade.

Pour qui n’a pas l’habitude de profiter de la vie à l’extérieur, dont l’occupation tient enfermé le soir à pas d’heure, faire l’école buissonnière demande une profonde réflexion.

Il est cependant des fois où la sagesse n’est pas de mise. C’est ainsi que ce jour, à l’heure de sa visite rituelle, le papillon dépité, trouve le bureau vide de toute occupation humaine.

Dans un premier temps, le papillon s’alarme de cette absence, puis très vite, il comprend que le printemps en est la cause, et n’a-t-il pas lui-même conseillé à plusieurs reprises à l’Écrivain de s’aérer de temps en temps ? Il lui suffit maintenant de se rendre dans la partie du jardin ensoleillée, mais à l’abri du vent, ce qu’il fait aussitôt, en butinant au passage valériane et giroflée, pour y retrouver Vincent.

En effet, c’est sur une chaise longue, sous un arbre en fleurs, qu’il découvre l’Écrivain endormi.

Et comme dit le poète, le papillon déclame en le regardant dormir :

« Je la verrai : l’air est serein,

Le ciel est pur et sans nuage ;

Sous les tilleuls de ce jardin

Elle viendra chercher l’ombrage.

De loin mes regards la suivront

Parmi la foule murmurante ;

Nos yeux muets se parleront,

Et j’oublierai ma longue attente…[2] »

Ce n’est pas « elle » mais « lui » mais qu’importe, le ciel est pur et l’air serein et je n’aurai pas eu une longue attente pour le retrouver !

Le papillon, après avoir virevolté ici et là, le temps de se délecter du parfum du thym, de la camomille, du pois de senteur et de toutes les fleurs se trouvant sur son passage, décide de prendre lui aussi un temps de repos sur une rose trémière. C’est le Lis Aureto[3] qui les bercera tous deux le temps de leur sieste, jusqu’en fin d’après-midi.


[1] Nom commun du chêne vert en provençal ou Yeuse

[2] Jean Polonius. « Je la verrai »

[3] Brises et zéphyrs, vents doux et agréables, associés au printemps.

Rose …et l’héritage de Monsieur Dominique

Honorine

La maison est débarrassée des dernières traces des fêtes de fin d’année. Enfants et petits-enfants sont rentrés chez eux, laissant un grand vide dans la maison. Honorine a décidé de vivre cette nouvelle année sur d’autres bases que celles de l’année précédente chaotique à plus d’un égard, et de l’oublier autant que faire se peut.

— Honoré, c’est décidé cette année la télévision ça sera au rang du smig !

— Et que tu-dis là Honorine, la télévision au rang du smig ? Tu n’as pas pris froid à la tête dis-moi ?

— Bou diou, ce que tu ne vas pas chercher mon pauvre ami, je vais bien rassure-toi !

— Alors explique-toi !

  • Je voulais te dire que la télévision m’a assez contrariée l’année dernière, donc cette année, ça sera Service Minimum Garanti, je refuse de me laisser manger par elle, et c’est pour cela que…

— Et c’est pour cela que tu as ressorti de nouveau ton tricot, et un monceau de livres !

— Eh bien voilà nous y sommes, tu as enfin compris, et je crois même que lorsque le temps le permettra j’irai mettre un bout de nez dehors !

— Voilà de bonnes résolutions, tâche de les tenir ! J’en ai entendu d’autres qui sont passées aux oubliettes. Les livres, j’ai vu que tu as dû commencer à en lire beaucoup si j’en crois tes marque-pages ?

— Eh oui, sans arriver à me concentrer sur aucun ! Il va falloir que je reparte de la première page, je ne me souviens plus ce que j’ai déjà lu !

— Tu sais Honorine, je crois que je vais faire comme toi… sauf pour le tricot !

— Honoré tu devrais essayer, que des fois tu y prennes goût !

— On peut toujours pantailler[1] mais non, je ne crois pas !

— C’est bien dommage, on aurait pu se partager les modèles ! Hi hi !

— Honorine ne galège pas trop ! Je pourrais tesurprendre !

— Pour une surprise, ce serait une belle surprise ! Vaï, je préfère que tu t’occupes des plantes, c’est plus sûr !

— Je te rassure, moi aussi je préfère m’occuper des plantes !

— Tu vas pouvoir t’en occuper bientôt, j’ai entendu le printemps dire qu’il se préparait à arriver !

— Hé bé ! J’ignorais que ma femme entretenait de la correspondance avec le printemps !

— Mon ami tu es loin de tout savoir, ce sont mes petits secrets !

— Tu connais le proverbe, « un homme averti »? Hé bé ! Maintenant je serai sur mes gardes à l’avenir !

— Honoré, pour le printemps… je peux lui dire de venir rapidement si tu veux ?

— Oui, oui, dis-lui qu’on l’attend le plus vite possible ! Et n’oublie pas de lui dire qu’aqui sian ben [2]!

— C’est comme si c’était fait !

Le printemps informé par Honorine qu’on l’attendait, il ne restait plus à cette dernière qu’à choisir le livre qui allait lui tenir compagnie pendant quelques jours.

— Rose ? C’est joli comme prénom, de plus il est question d’héritage ! Un marque-pages pour ne plus me perdre dans ma lecture, et voyons voir ce qui s’y passe dans ce livre !


[1] Rêver

[2] Ici on est bien

L’an vin (G) t… Ou l’ennemi invisible !

M’âme Églantine est de retour

Les « Bavardages Indiscrets[1] » avaient eu raison de M’âme Églantine. C’est en toute bonne foi qu’elle avait dit à Horace :

— Je crois qu’il est temps que je prenne un peu de repos.

— Alléluia ! Vraiment nous n’aurons plus droit à de costume taillé aux uns et autres ?

— Plus ? Comme tu y vas ! Le temps de reprendre un peu souffle et puis on verra bien ce que nous réserve l’avenir.

— Aussi je me disais ! Alors on se donne rendez-vous bientôt pour de nouvelles aventures ?

— Tout à fait ! Un peu de calme ne fera pas de mal.

Tout à une fin, et y compris le repos de M’âme Églantine, qui commence sérieusement à s’ennuyer.

Un peu plus d’une année s’est écoulée depuis qu’Horace a entendu sa maîtresse manifester le souhait de prendre un peu de répit. Très curieusement, et compte-tenu du caractère bien trempé des occupants des lieux, la cohabitation s’est pourtant passée plutôt dans le calme. Cependant, depuis quelques jours, Horace ressent une sorte de malaise, présageant un changement proche dans les occupations de la propriétaire des lieux.

La ville a retrouvé l’animation des retours de vacances. Quelques touristes se promènent encore dans les rues, pendant que d’autres s’attardent aux terrasses des cafés. L’été n’est pas encore prêt à prendre ses quartiers d’hiver dans la région. Est-ce, cette effervescence nouvelle après les chaleurs de l’été, qui agite plus que de raison M’âme Églantine ?

— Horace…je me disais que…

— Allons bon, c’était trop beau pour durer ! Alors vous dites quoi vous ?

— Non mais c’est quoi ce ton, du calme ! Je me disais…je me disais…

— Et quoi encore ?

— Je me disais que je pourrais aller faire un petit tour par-ci par-là, compte tenu de cette belle journée.

— Nous y sommes ! Euh…

— Tu ne dis rien ?

— Que voulez-vous que je dise, de toute façon vous n’en ferez qu’à votre tête !

— En fait, je ne vois pas pourquoi je te demande ton avis !

— En effet ! Allez donc où vous voulez, moi, je ne bouge pas !

— Oui mais…

— Vous ne pouvez pas me laisser dormir tranquille ! Mais quoi ?

— Aller…aller …je peux toujours aller, la question est plutôt où ?

— Ce ne sont pas les lieux qui manquent ! Faites donc un tour dans les musées ça changera du marché !

— Les musées ? Hum, vraiment, je ne sais pas si c’est le bon endroit pour…

— Vous me faites rire ! Pour y rencontrer vos amies de « potinage », ah certes non !

— Il y a de ça certes…pas seulement…la poussière, la poussière Horace, dans les musées il doit y en avoir beaucoup avec toutes ces vieilles choses ?

— La quoi ? C’est une plaisanterie de votre part, je suppose ?

— Enfin toutes ces vieilleries, il doit y avoir des mites, je ne sais pas moi, des microbes de toutes sortes ? Et le conservateur du musée, je me suis laissé dire que pour vivre là-dedans ça devait- être une antiquité lui-même ! Tu as vu un peu les gardiens ?

— Le repos n’a pas eu d’effet bénéfique sur votre imagination, et pourquoi serait-ce une personne âgée le conservateur ?

— En fait, j’ai toujours imaginé que ça ne pouvait être que quelqu’un…

— Que quelqu’un ?

— Eh bien une — antiquaille — en quelque sorte !

— Une antiquaille comme vous y allez ! Je me demande si au moins vous savez ce que ce mot veut dire ! Vous avez encore beaucoup à apprendre et si ce n’est pas malheureux que ce soit moi qui vous dise, qu’il n’est pas question d’âge mais d’érudition, pour ce poste ! Ce sont ni plus ni moins des Anges gardiens des œuvres d’art !

— Tiens, les gardiens parlons en justement, que tu vois ne rien faire dans les salles, alors anges gardiens tu n’exagères pas un peu ?

— Oui anges gardien ! Méditez donc là-dessus, ça vous permettra de briller un peu avec vos copines, de quoi leur en boucher un coin, vous devriez me dire merci ! Pour les gardiens qui déambulent dans les salles, ils ne font que leur travail de surveillance !

— Leur travail de surveillance, voyez-vous ça, et lorsqu’ils sont assis sur une chaise, hein qu’est-ce que tu en dis, ils font quoi ?

— J’en dis que de temps en temps, ils ont le droit de reposer leurs jambes, et que ça ne nuit en rien à leur surveillance !

— Évidemment tu prends leur parti ! Euh, pour les copines c’est vrai que ça peut me servir mais te dire merci, n’en demande pas trop quand même !

— Comme vous voulez ! Moi je vais reprendre ma sieste.

— Pendant que tu dors, je vais de mon côté me pencher sur le problème. Des anges gardien, c’est vrai que ça peut impressionner les —m’as-tu vu — du marché !

— Penchez-vous, mais pas trop, vous pourriez tomber !

— Monsieur fait de l’humour, moi je te conseillerai plutôt de reprendre ta sieste si tu ne veux pas que je m’agace ! C’est qu’il m’empêcherait de réfléchir l’animal ! Je ne peux quand même pas me lancer tout de go à parler des musées sans amener avec élégance la chose ! Et ce chat qui s’est remis à dormir, parfois il faut reconnaître qu’il a de bonnes idées, mais là je crains de ne pouvoir compter sur lui.

Bien des mois passèrent sans qu’aucune décision ne soit prise et surtout aucune sortie organisée. La valse-hésitation continua entre j’y vais ou je n’y vais pas ? Puis comme par magie le printemps fut là, le temps de s’occuper des plantations pour fleurir le balcon, passa l’été avec ses grosses chaleurs qui incitent plus à faire la sieste plutôt que de courir après d’hypothétiques rencontres, l’automne arriva sans qu’on s’en aperçoive avec ses belles couleurs dans le parc voisin et, arriva enfin la saison d’hiver.

M’âme Églantine ne s’était toujours pas décidée à courir à la rencontre de comparses. Le cœur n’y était plus, tous ces commérages avaient eu raison du plaisir qu’elle avait pu éprouver par le passé.

C’est un peu lassant, disait-elle, toujours ces mêmes commères qui jacassent sans savoir ce qu’elles disent la plupart du temps,

Ça ne durera pas, murmurait Horace, je connais bien ce regard qu’elle a parfois.

À l’époque, on était loin d’imaginer que des évènements allaient décider pour tout un chacun de ce qu’il pourrait ou ne pourrait pas faire, et qu’il se tramait en silence, la propagation d’un virus d’une grande ampleur. Ce mal inconnu, sournois, se préparait à envahir la terre comme pourrait le faire une armée ennemie.

 Personne n’a rien vu ni entendu ? À croire que les humains sont restés sourds à des avertissements sans doute pas assez explicites pour attirer leur attention, en se pensant invulnérables, et intouchables à toutes catastrophes nouvelles.


[1] Églantine Nalge. Édition Amazon 2019.

Spaghetti aux courgettes

Certes, ce ne sont que des pâtes dirait Don Camillo, cependant avec les courgettes ça change tout ! Il nous faut donc, pour 4 personnes:
4 à 500 g de spaghetti…Les cuire al dente…perso je les ai fait cuire un peu trop.
4 belles courgettes…les éplucher et le râper…merci le robot.
1 poignons d’oignons en lamelles…surgelés les oignons, c’est l’idéal ! Plus d’oignons qui moisissent, rien à éplucher.
Huile d’olive…à convenance
50 cl de crème épaisse … allégée c’est bon pour la santé
100 g de parmesan…râpé.  Sel, poivre à convenance.

Dans la sauteuse, faire revenir l’oignon doucement dans l’huile d’olive, et rajouter après les courgettes râpées. Laisser cuire une dizaine de minutes, ajouter  ensuite le parmesan, et la crème. Bien mélanger.
Lorsque c’est cuit, il est temps d’incorporer les spaghetti, que vous aurez fait cuire suivant votre convenance. Saler poivrer.

Manger chaud !

Conseiller-Styliste auprès des Araignées

Métiers improbables. page 21…
Les Anthologies Ephémères. The bookEdition.com

Ce livre édité au profit de l’Association Rêves pour que les bénéfices permettent la réalisation de rêves d’enfants malades,  s’achète ici :
https://www.thebookedition.com/738113-img_product_list/metiers-improbables.jpg

Aujourd’hui mes petits- enfants et peut être à vous aussi les plus grands, je m’en vais vous conter comment Adalberto prince déchu dans son pays, se retrouva nanti d’une mission de la plus haute importance sur une terre nouvelle.

Il y a très longtemps et un jour où le temps était particulièrement maussade, ce prince déchu prit conscience qu’il ne faisant plus bon pour lui de s’attarder sur les terres où cependant il avait vu le jour. Une horde de gens malveillants voulaient le dépouiller de ses biens et menaçaient sa vie. Il en était certain, tous les évènement de ces derniers jours concouraient dans ce sens.  Il ne fallait donc plus tergiverser et c’est en prenant d’immenses précautions et avec Folichon, son âne fidèle, qu’il partit par une nuit sans lune. Il marcha, marcha et marcha encore à l’aventure et par le plus grand des hasards mais peut être en était-il pas un, il se retrouva en contrée des Aranéomorphae[1]. Nul ne sut jamais et lui non plus, quelle était l’étoile qui l’avait guidé.

La famille Arganeau, régnait depuis des lustres sur les différentes domaines de ce vaste pays, et le descendant actuel, Morphaé de son nom, en tenait les rênes de mains fermes et malheur à quiconque se serait permis de déroger à ses ordres où aurait l’heur de lui déplaire. Ce voyageur inconnu mais royalement vêtu, intrigua fortement le souverain lorsqu’il demanda asile à sa porte. Pour en savoir un peu plus sur son état, il l’invita à séjourner quelques jours au palais en attendant d’avoir une vue un peu plus claire de la situation.

Le jeune Adalberto, prit donc possession des lieux mis à sa disposition, après avoir pris soin de Folichon. Quelques jours passèrent dans une atmosphère de bon aloi. C’est donc en toute innocence et avec les meilleurs sentiments du monde, qu’il se laissa aller à l’occasion d’une conversation à bâton rompus, à quelques remarques qu’il pensait anodines sur les toiles qui ornaient le palais. Toiles sur lesquelles la femme de ménage, employée formée sur le travail à effectuer et bien au fait des choses, se gardait bien d’y passer son plumeau.

  • Mon jeune ami (il faut cependant se méfier lorsqu’un monarque vous appelle ami et à plus forte raison jeune), mon jeune ami disait-il donc, puisque les toiles de ma demeure n’ont pas l’heur de vous plaire, peut être pourrez- vous me dire à quel titre vous portez ce jugement.
  • Sans vouloir vous déplaire Monseigneur, ma charge de styliste renommé, me permet de penser que ces toiles ne sont pas faites dans le respect des règles de l’art. Le travail n’est pas fait avec assez de soin du moins me semble -t-il, pour certaines d’entre elles !
  • Et quelles sont les règles de l’art je vous prie ?
  • Celles-ci sont fort complexes suivant les entrepôts où elles sont fabriquées, nous avons des toiles dites « orbitèles » toutes constituées par les mêmes éléments, les toiles irrégulières bien plus nombreuses dont les principales sont « les chaussettes, les tubes à collerettes etc…
  • Arrêtons là cette énumération fastidieuse, vous me semblez connaitre votre sujet. Puisque vous êtes oisif en ce moment et que vous voulez vous installer sur nos terres, vous partirez dès l’aube, demain matin à travers le pays pour procéder à un état et remise en ordre si nécessaire, de toutes les toiles réalisées. À cet effet je vous décerne la charge de : Conseiller-Styliste auprès des Araignées. Vous serez particulièrement vigilant au style et à la forme de chacune des réalisations. À vous de faire preuve d’autorité et de maîtrise, pour imposer aux araignées de travailler avec élégance leurs toiles afin que nul n’ait à redire en la matière.
  • La matière, il me semble Maître sans vouloir vous offenser, que nous parlons de soie, textile précieux et j’ai eue à constater que parfois certaines dédaignaient la toile pour se contenter d’un simple fil.
  • C’est bien pour cela qu’il convient que vous vous mettiez en chemin pour rappeler à ces demoiselles combien le tissage à son importance et le soin qui doit y être apporté.
  • J’ai bien noté Sire, et je me fais fort de le rappeler à toutes ses laborieuses peu attentives.

Et c’est ainsi que le Prince déchu, se retrouva Conseiller-Styliste auprès des Araignées, non seulement du palais mais de toute la contrée, ce qui incluait des déplacements souvent nuit et jour pour être à l’aube sur les lieux tant il prit sa mission au sérieux.

On dit, mais que ne dit-on pas …

Que depuis qu’Adalberto eut cette charge, la production de belles toiles d’araignées prospère de façon notable, particulièrement dans les endroits où Monsieur Le Plumeau est interdit de séjour !

[1] Araignées dites modernes 😊

Page 24

La Cruche

La cruche, élancée, néanmoins aux courbes généreuses, d’une belle couleur verte, vernissée et luisante à souhait, était fatiguée des allers-retours qu’elle faisait de la maison à la fontaine située à l’extrémité du village. D’autant qu’elle était reléguée ensuite dans l’arrière cuisinée et que personne ne lui adressait plus la parole.

Certes, parfois elle entendait quelqu’un s’exclamer avec du plaisir dans la voix :

– Que cette eau est fraîche et agréable à boire !

Sauf que le mérite ne semblait pas lui revenir : on attribuait toujours ces bienfaits à la fontaine.

Donc, un jour où elle se sentait encore plus blessée que d’habitude par cette indifférence, elle décida de partir voir ailleurs avant qu’on ne la transforme en pot de fleurs…d’autant qu’il était question d’adduction d’eau pour les maisons, dans un avenir très proche.

– Je sais, je sais se disait-elle souvent, on dit que l’herbe n’est pas plus verte ailleurs mais qui n’ose rien ne peut que se morfondre dans sa petite vie et tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle se lasse !

Seulement voilà comment faire lorsqu’on n’est pas plus bête qu’une autre mais qu’on est quand même une cruche ? Dans la situation qui était la sienne, il fallait profiter, d’une nuit sans lune… Ceci étant acquis, elle devait aussi trouver le moyen de se glisser en silence à l’extérieur.

Il faut dire que son arrière, arrière et arrière-grand-mère ainsi que sa mère, avaient été victimes d’une jeteuse de sort, pour avoir fait des yeux doux, à un coquin qui ne demandait que ça. Comme elle avait hérité de ce sortilège, dont elle se serait bien passée, la cruche ne pouvait reprendre une apparence humaine que la nuit, et ce, jusqu’au jour où elle arriverait à s’échapper enfin de la maison, où l’on avait condamnée à vive. Ce jour-là viendrait très bientôt elle en était sure ; elle sentait chaque nuit comme un frémissement, les prémices d’une belle aventure.

Lors de ses recherches nocturnes, la demoiselle en liberté provisoire, farfouillait impatiemment dans le grenier. Elle fit un méli-mélo   de toutes les documentations qu’elle y découvrit, fabriquant un autre monde à sa façon.

C’est vers ce pays, créé dans un imaginaire fertile, mais qui existait peut-être quelque part, sur une planète toujours à explorer, qu’elle s’enfuirait bientôt. Elle y songeait depuis si longtemps que cela prendrait forme, forcément. Restait la question importante à régler : comment y aller ?

Elle devait avant tout donner un nom à ce pays pour s’y repérer…rien ne venait à son esprit …elle verrai plus tard. Il faudrait que ce nom porte en lui la magie du lieu afin que tous aient envie de le découvrir. Dans ce nouveau monde, les villes seraient de petites dimensions, pour le confort des gens et de meilleures relations ente eux. Il offrirait à chacun des paysages verdoyants et lumineux, des collines donnant sur l’infini…le parfum du miel se mêlant à l’odeur des champs d’oliviers… Des vignes à perte de vue, monterait le chant joyeux des vendangeurs à l’automne… Des allées de cyprès dont on ne sait où elles mènent, accompagneraient le voyageur dans ses errances.

Sa première incursion, elle l’imaginait déjà dans une cité où dominerait un enchevêtrement de petites ruelles, baignées uniquement par la lumière que renvoient les  pierres roses des façades de maisons, tels des miroirs. Le soir, au coucher du soleil, l’ocre y reprendrait la main pour une lumière plus douce dans les rues.

Tel était son destin ! Elle n’avait plus aucun doute : elle devait se concentrer sur cette terre inconnue mais porteuse de tant d’espoir et de richesses.

Les premières lueurs de l’aube n’étaient pas loin…Pourquoi attendre plus longtemps pour s’échapper et se libérer enfin de son carcan maléfique ?

Ce n’est qu’au matin que les gens de la maison, ébahis, trouvèrent dans le grenier, les morceaux d’une cruche brisée.

Tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle …s’en va !

*********

Pour lire les autres histoires il suffit d’acheter ce livre, chez Bookedition, édité au profit des enfants malades pour réaliser leur rêve, par l’intermédiaire de l’Association Rêves.

 

C’était …il y a 2 ans…

Pratiquement, jour pour jour:  93 cœurs  avaient revêtu leurs plus beaux habits pour pour un Mariage et des rêves d’enfants.

Après le Mariage, comme Ulysse, ils sont partis en Voyage…mais la petite troupe s’est agrandie et c’est 113 auteurs et/ou illustrateurs, qui cette année ont tenté l’aventure…réaliser le Rêve d’un ou des enfants malades.

Les livres déjà publiés:

Quichottine disait à l’occasion de la publication du  livre le Mariage :

« Parmi nous, des personnes de nombreux pays et horizons, de tous les âges (neuf ans à plus de quatre-vingts) déjà connues dans leur domaine, dans leur art (artistes – photographes, peintres, sculpteurs, écrivains) et puis d’autres, anonymes qu’on ne connaîtra jamais que sous les pseudonymes qu’ils se sont choisis.

Chaque fois que nous avons réussi à faire sourire un enfant, nous en avons été immensément heureux. Depuis notre premier livre cinq rêves sont déjà réalisés, un autre est en passe de l’être, nous avons versé près de huit mille euros à l’association Rêves » .

Une souscription est prévue incessamment sous peu ! Merci à tous ceux qui achèteront ce livre et qui partageront cette information avec leurs amis et connaissances par mail et sur les réseaux sociaux.

Qu’on se le dise !!!!